Les vendanges ont commencé mi-août en Occitanie. Après une année très chaude, et malgré le mildiou (*), le vin de la cuvée 2018 s’annonce d’ores et déjà comme un bon millésime. Le bal des vendanges a commencé en Occitanie et c’est le Sud-Ouest qui a donné le coup d’envoi de la saison.
Avec le concours de Stéphanie Prabonnaud (Laboratoire Natoli & associés), Nicolas Dornier (Clos des vins d’amour), Francis Terral (Vinovalie), Joël Boueilh (Saint-Mont).
Alors que la maturité des raisins progresse globalement à un bon rythme après une période de fortes chaleurs durant la véraison, le démarrage significatif des vendanges sur les cépages et secteurs précoces de notre région est intervenu à mi-août. On revient ainsi dans la norme après une année 2017 extrêmement précoce. Les conditions au vignoble sont à ce stade très contrastées mais assez favorables, avec de bonnes perspectives de récolte dans les secteurs qui ont échappé à la grêle et aux dégâts de mildiou sur grappes. Avec une sortie de grappes généreuse, le cycle végétatif a démarré dans de bonnes conditions climatiques, avec une recharge hydrique des sols très satisfaisante après des précipitations hivernales et printanières supérieures aux années précédentes. Des pluies répétées dans une ambiance plus chaude ont ensuite favorisé les contaminations par le mildiou, à un niveau de virulence très inhabituel.
Les attaques du champignon qui ont démarré avant la floraison se sont poursuivies pendant une longue période et ont été inégalement contenues, conduisant à des pertes de récolte plus ou moins importantes. Des pertes totales sont identifiées sur un certain nombre de parcelles, la maîtrise du champignon s’étant révélée particulièrement compliquée dans les vignobles cultivés en mode biologique. Si certains dégâts sur la récolte étaient déjà visibles avant l’été, il a fallu attendre la véraison pour mieux en apprécier l’ampleur et l’étendue, ce qui conduit à revoir actuellement la prévision de récolte à la baisse.
Outre leur impact sanitaire, les épisodes orageux qui se sont succédé à intervalles réguliers à partir de la floraison et jusqu’à ces derniers jours ont provoqué des dégâts de grêle localisés plus ou moins sévères, les épisodes des 3 et 13 juillet survenus dans l’ouest audois et sur une partie de son vignoble littoral ayant été les plus ravageurs. Par contre, les pluies survenues depuis la véraison qui ont accompagné ces épisodes ont limité les situations de stress hydrique dans la plupart des vignobles. Ces conditions sont favorables au grossissement des baies et à la poursuite d’une maturation équilibrée, sous réserve du maintien d’un état sanitaire satisfaisant. Le volume de production s’annonce assez variable suivant les parcelles et les secteurs, du fait du mildiou en particulier, mais les conditions climatiques actuelles favorables permettent d’aborder les vendanges avec optimisme en ce qui concerne la qualité des raisins et leur potentiel œnologique.
Dans ce contexte de conditions de maturation favorables et de confirmation du fort impact quantitatif global du mildiou sur grappe, l’estimation du volume de récolte effectuée par la préfecture de région s’établit actuellement à 12 Mhl pour les quatre départements du Languedoc-Roussillon, au dessus de 2017 mais en dessous des récoltes de 2013, 2014, 2015 et 2016.
Tour d’horizon par zone de production….
LANGUEDOC et VALLÉE DU RHÔNE
Les vendanges 2018 démarrent, après une campagne plutôt atypique dans les vignobles du Languedoc et de la Vallée du Rhône. Après un automne particulièrement sec, la pluviométrie de fin d’hiver et de printemps a été abondante, avec des cumuls de pluies très importants notamment sur les mois de mai et début juin. « Les vignes ont plutôt bien profité de cette recharge des réserves hydriques, avec des végétations assez soutenues dans l’ensemble », indique Stéphanie Prabonnaud, ingénieur agronome et oenologue chez le laboratoire Natoli & associés. A la veille des vendanges, les vignes étaient peu marquées par les signes de stress hydrique visibles lors de précédents millésimes, malgré la canicule du milieu de l’été.
« Le corollaire de ces pluies a été la forte pression phytosanitaire, en particulier la pression mildiou, poursuit Stéphanie Prabonnaud. L’épidémie a atteint un niveau rarement égalé sur nos vignobles, portant sur de très vastes surfaces. Des pertes de récolte ont été enregistrées, et au final des situations très contrastées et hétérogènes vont cohabiter : du vignoble impacté par le mildiou avec donc des récoltes limitées, aux domaines ayant pu maintenir le (bon) potentiel de charge du début de campagne, avec de belles récoltes annoncées. On devrait suivre cette hétérogénéité dans l’évolution des maturités, lentes à venir ou au contraire très rapides selon les charges. » On devrait enfin cette année, toujours en Languedoc et dans la Vallée du Rhône, retrouver des dates de récoltes normales, après un millésime 2017 particulièrement précoce.
« Et, ajoute l’ingénieur agronome, on peut également se réjouir de bonnes conditions de maturation depuis la mi-août, avec le retour de bonnes amplitudes thermiques diurnes/nocturnes : même si les niveaux d’acidité ont pu souffrir de la canicule estivale, la maturité phénolique et la préservation des arômes devraient être favorisées. » Les premiers blancs vendangés montrent ainsi de belles expressions aromatiques, et les pellicules des raisins noirs apparaissent épaisses et qualitatives.
ROUSSILLON
Avec un hiver sec, un printemps humide, un mois de juillet caniculaire jour et nuit et des dégâts dus au mildiou, l’année dans les vignes roussillonnaises a été « compliquée » de l’aveu même de l’oenologue du Clos des Vins d’amour à Maury dans les Pyrénées-Orientales. Ce dernier poursuit : « On s’aperçoit qu’à la cueillette nous avons une chute d’acidité. La plante a consommé beaucoup d’acide pendant les chaleurs et nous avons donc des maturités ralenties avec un PH élevé et des grains peu volumineux. » Avec des jus mûrs et des acides faibles, il faut donc cueillir en dessous de la maturité. Mais pas d’inquiétude : l’état sanitaire du raisin est « joli ». En terme de qualité, le millésime 2018 ne sera pas très aromatique et, en terme de quantité, « elle sera moyenne à faible comme l’an passé », ajoute Nicolas Dornier.
SUD OUEST
Sur la zone de production du Sud-Ouest (Gaillac, Cahors, Marcillac, Fronton, Gers…), la première de la région Occitanie à avoir démarré les vendanges cette année, la tendance générale est meilleure que l’année dernière période pendant laquelle le gel a impacté de nombreuses exploitations. Grâce notamment à de belles sorties au printemps, la récolte devrait atteindre les 230 000 à 240 000 hectolitres. Soit bien mieux donc qu’en 2017 (170 000 hectolitres) et à peine en dessous de 2016, une année médiane (270 000 hectolitres). Selon Francis Terral, président de Vinovalie, le mildiou a causé de gros soucis sanitaires aux vignerons « mais il a certainement été mieux maîtrisé qu’ailleurs ». Ouf !
Il ne faut cependant pas relâcher sa vigilance : « En mai et juin, la météo a été capricieuse. Nous avons été quelque peu trop confiants. Il faut être plus vigilant oui, plus réactif en traitant notamment avant les pluies. » Pour meilleure preuve, les vignes « bio » qui ont été moins impactées car la vigilance est accrue sur celles-ci. Reste en attendant la fin des vendanges, deux inconnues : l’impact de la sécheresse de cet été et celui du mildiou sur grappe. Mais pour Francis Terral, aucun doute : nous nous dirigeons vers « un très bon millésime 2018 ».
Dans le Gers, on se dirige vers un millésime « normal », indique Joël Boueilh, vigneron à Saint-Mont. « Nous n’aurons pas des vendanges plus précoces que d’habitude contrairement à ailleurs et nous vendangerons jusqu’au 10 octobre. » Dans le Gers, les exploitants ont été chanceux car le mildiou s’est fait discret et ceux-ci ont surtout réussi à se protéger des maladies.
(*) : pour mémoire, le mildiou, plasmopara viticola, est un champignon parasite spécifique de la vigne. Il se développe à la faveur des printemps pluvieux et doux. Contaminant les organes verts de la vigne, il peut entraîner des pertes de récoltes, ainsi que des problèmes de qualité des vins et d’affaiblissement des ceps.
Publié le 4 septembre 2018