Exclusivité tacite de distribution et rupture brutale des relations commerciales établies (CA Paris, 6 Juillet 2017, n° 16/01061)

En 2000, une société ayant pour activité la production et la vente de machines agricoles, a confié à un agent commercial la commercialisation de ses produits. Cet agent, intermédiaire rémunéré à la commission, est intervenu au fil du temps en qualité de distributeur acheteur/revendeur rémunéré via sa marge à travers sa société nouvellement créée, et a cessé ses fonctions initiales d’agent.
Considérant que son partenaire ne respectait plus leurs accords, le distributeur a assigné le fabricant en rupture brutale de la relation commerciale établie et réparation du préjudice. Concernant la durée des relations, il est intéressant de relever que la Cour va prendre en considération aussi bien l’activité de distribution que celle antérieure d’agence commerciale au motif que la société victime de la rupture « a bien repris l’expérience et le fichier clients de son gérant, qui a continué à travailler en changeant seulement de qualité et de mode de rémunération ».
Cette solution est pour le moins discutable dès lors que, pour la jurisprudence établie, les dispositions relatives à la rupture brutale ne s’appliquent pas aux agents commerciaux, qui par contre bénéficient d’un préavis spécifique et d’une indemnité de fin de contrat.

Autre question intéressante, celle de l’exclusivité.

La Cour va en effet retenir une exclusivité au bénéfice du distributeur alors même qu’aucun contrat écrit n’avait été conclu. Il s’agissait donc d’une exclusivité tacitement convenue. Pour ce faire, les magistrats se fondent notamment sur : une publicité du fabricant le désignant comme « importateur exclusif » ; la carte de France de répartition des concessionnaires.
C’est d’ailleurs cette exclusivité qui va permettre à la Cour de retenir la responsabilité du fabricant à l’origine de la rupture dès lors que : ce dernier a informé son distributeur qu’il tenait son propre stand au salon interprofessionnel des machines agricoles alors que jusque-là seul le distributeur exposait ; ce dernier a, par voie de presse, informé la clientèle que ses produits étaient distribués par une autre société.
Pour l’ensemble de ces raisons, le fabricant été donc à l’origine de la rupture des relations. Ce faisant, dès lors que son distributeur n’avait pas commis de faute grave privative de préavis, cette dernière aurait dû, compte tenu de l’ancienneté de la relation (13 ans) et l’absence d’état de dépendance économique, respecter un préavis de six mois.
Le préjudice du distributeur est donc classiquement évalué en considération de la perte de marge brute sur ces 6 mois et de la valeur des stocks de pièces détachées (dûment justifiée par des inventaires détaillés des produits).

En pratique : la rédaction d’un contrat aurait permis aux parties de prévoir précisément non seulement l’exclusivité concédée au distributeur mais aussi ses contreparties : diligences ; objectifs ; etc.

Aymeric Louvet, Klyb avocats

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Au sommaire

  1. RESEAU DE DISTRIBUTION
  2. PROMOTION
  3. FORMATION ET EXÉCUTION DES CONTRATS : CONFORMITÉ ET RESPONSABILITÉ PRODUITS
  4. ACCORDS INTERPROFESSIONNELS

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