Matthieu Dubernet, PDG du prestigieux laboratoire d’œnologie audois, nous livre sa gestion de crise de coronavirus Covid-19 après deux mois de confinement.
Qu’avez-vous mis en place pour traverser cette crise sanitaire du coronavirus Covid-19?
Il a fallu réorganiser le fonctionnement de l’entreprise sachant que pour nous il n’était pas envisageable de fermer puisque nous relevons d’une activité indispensable au maintien de la qualité des vins. Il fallait poursuivre l’analyse des vins pour éviter toute mauvaise surprise et accompagner nos clients. Très rapidement, avant même le confinement, nous avons mis en place deux équipes d’une petite dizaine de personnes afin de créer une distanciation sociale. Elles ne se croisaient pas et alternaient chaque semaine.
Tous les salariés ont-ils pu maintenir leur activité ?
Une vingtaine de salariés sur un total d’une trentaine. Un tiers de personnes a travaillé en laboratoire, un autre tiers a fonctionné en télétravail – même si ce n’est pas évident dans notre activité puisque les échantillons ne peuvent pas être téléchargés – et un dernier tiers était au chômage technique.
En pratique, comment cela s’est passé ? Tout le monde a-t-il « joué le jeu » ?
Oui, je dois reconnaître et louer la compréhension et l’implication de l’ensemble des salariés. Il a fallu faire vite et bien, cela n’aurait pas été possible sans cet état d’esprit. Nous comptons vraiment sur de bonnes équipes, toutes les entreprises n’ont pas eu ce privilège.
Avez-vous relevé d’autres éléments positifs dans cet esprit pour les laboratoires Dubernet ?
Le fait d’avoir une forme de pause forcée comme celle-là, dans le maelström permanent actuel, nous a permis de nous pencher sur des sujets de fond que nous n’avions pas le temps d’investir, de structurer des dossiers de R&D, de rédiger des publications… Nous avons pu aussi réfléchir et préparer l’étape post-covid-19.
Une telle crise n’est pas la fin du monde, c’est un changement d’état : plus que jamais, la prise de recul que le confinement et la réduction d’activité nous ont ouvert la porte à cette réflexion autour d’une nécessaire adaptation.
Même si rien n’est terminé, quelles ont été, pour vous, les clés de la réussite de votre gestion de crise ?
Vous avez raison de dire que rien n’est terminé. Au-delà de la crise sanitaire, il faut affronter désormais une crise économique et sociale dans laquelle nous plongeons profondément et sur laquelle personne n’est capable de mesurer l’étendue. Aujourd’hui, plusieurs éléments nous poussent à penser que nous serons résilients.
Le premier, c’est la nature même de l’activité et du contrat passé avec nos clients : la notion de récurrence est essentielle. Nous avons une chance extraordinaire, en tant que laboratoire d’oenologie, d’avoir une relation basée sur la fidélité – depuis des décennies pour certains ! – et la crise n’y changera rien.
Le second élément, c’est le présent. Il est indispensable de veille en permanence à avoir une trésorerie forte. Pour supporter les retards de paiements de nos clients d’une part ; d’autre part pour assurer vis-à-vis de nos fournisseurs. Je crois énormément à cette pratique essentielle qui est de ne surtout pas ralentir nos paiements : nous devons être responsables !
Que pensez-vous du prêt garanti par l’Etat (PGE) ? Avez-vous fait appel à celui-ci ?
Le prêt garanti par l’Etat est aujourd’hui un objet qui doit permettre d’accéder à l’argent avec des facilités qui n’ont jamais existé dans l’histoire de l’économie moderne. Il faut le rappeler à tout le monde. Que l’on en ait besoin, beaucoup ou peu, je crois qu’il faut faire vraiment jouer tous ces leviers à fond. Il est de notre responsabilité d’entrepreneur de mettre le maximum de sécurité avec ce que nous offre aujourd’hui la gouvernance économique européenne. Il ne faut surtout pas hésiter à consulter ces guichets-là. N’ayons pas peur de le faire même si le besoin n’est pas urgent.
Moi, personnellement, j’ai demandé 500 000 euros de trésorerie. Je n’ai pas honte de le dire. Il ne faut pas penser que la trésorerie que l’on demande sera de l’argent qui peut manquer ailleurs car l’essentiel de l’argent produit par la BCE est de l’argent utilisé pour de la spéculation et non pas pour de la vraie économie.
Avez-vous consulté « le guide spécial coronavirus des bonnes pratiques et infos utiles pour les entreprises » de Vinseo ?
Je l’ai lu de très près oui. Notamment lors des premiers jours de confinement. Le plus dur pour une entreprise est de savoir où est passé le Nord sur la boussole. Toutes les informations qui ont pu être remontées par le cluster notamment étaient bienvenues et bonnes à prendre. Là-dessus je remercie Vinseo d’avoir fait ce travail, ce guide, qui nous a donné un certain nombre de repères.
ZOOM SUR… le Prêt garanti par l’Etat (PGE)
Jusqu’au 31 décembre, les entreprises de toute taille, quelle que soit la forme juridique de l’entreprise (notamment sociétés, commerçants, artisans, exploitants agricoles, professions libérales, micro-entrepreneurs, associations et fondations ayant une activité économique), à l’exception des sociétés civiles immobilières, des établissements de crédit et des sociétés de financement, peuvent demander à leur banque habituelle un prêt garanti par l’État (PGE) pour soutenir leur trésorerie.
Ce prêt pourra représenter jusqu’à 3 mois de chiffre d’affaires 2019, ou deux années de masse salariale pour les entreprises innovantes ou créées depuis le 1er janvier 2019. Aucun remboursement ne sera exigé la première année ; l’entreprise pourra choisir d’amortir le prêt sur une durée maximale de cinq ans. Les banques s’engagent à examiner toutes les demandes qui leur seront adressées et à leur donner une réponse rapide. Elles s’engagent à distribuer massivement, à prix coûtant, les prêts garantis par l’État pour soulager sans délai la trésorerie des entreprises et des professionnels.
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LABORATOIRES DUBERNET
35, rue de la Combe-du-Meunier, 11 100 Montredon-des-Corbières.
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Site web : www.dubernet.com