Le point sur la gestion de crise sanitaire chez itk avec Laïd Hafssa, directeur commercial et, par ailleurs, vice-président de Vinseo.
Pouvez-vous nous rappeler le rôle d’itk dans l’agriculture française et internationale ?
Nous sommes un acteur de l’intelligence artificielle au profit de la production agricole. Nos équipes sont constituées essentiellement de modélisateurs – tout le monde connaît les notions d’algorithme – et d’informaticiens avec une couche métier tournée vers l’agriculture. Nous offrons des solutions intelligentes pour l’agriculture dans trois grands domaines de production agricole :
- La viticulture, au sens large l’arboriculture, d’où le lien avec Vinseo ;
- Les grandes cultures (blé, maïs, soja) ;
- Plus récent pour nous, même si cela fait quatre ans que l’on traite la question, c’est la production animale, particulièrement autour de la production laitière ; les vaches pour faire simple.
Qu’entendez-vous par « solution intelligente » ?
Ce sont plutôt des outils stratégiques et tactiques. Des logiciels, dans les grandes lignes, qui vont aider la filière agricole à mieux produire, à prédire, puisque c’est tout l’intérêt de l’intelligence artificielle, d’amener des informations utiles à l’agriculteur, à son technicien conseil, etc. basées sur des simulations. Nos solutions touchent toute la filière agricole, de l’amont à l’aval.
Quelle était votre actualité avant l’arrivée de la pandémie en France ?
Une actualité classique itk avec des projets tournés autour de l’élevage, pas mal de choses autour de l’animal, et, pour rejoindre la viticulture, nous travaillions aussi sur de nouvelles fonctionnalités pour la fin d’année. En gros, tout ce qui concerne notre métier. Je pense aussi aux salons par exemple, notamment celui de l’élevage à Rennes, le Space. Mais hélas tout cela a été bouleversé, annulé par le Covid. Mais cela ne changera pas notre fusil d’épaule…
Justement, comment avez-vous appréhendé cette crise du Covid-19 ?
Il y a deux temps. Le premier a répondu à l’urgence. Il a fallu faire des choix. Opter pour l’arrêt total ou partiel de l’activité parce qu’on ne sait pas de quoi sera fait demain – certaines entreprises ont arrêté – soit l’on optait pour le chômage partiel. A itk, nous avons pris le parti de dire : « On continue, on n’arrête rien ! » et de maintenir l’activité au maximum plutôt que de la freiner ou carrément l’arrêter. La maître-mot étant bien sûr « restez chez vous », tout a été fait à distance. Notre chance est que nous sommes des acteurs du digital : le travail à domicile a été donc très facilité même si le présentiel est essentiel comme dans toute entreprise.
En revanche, la grande difficulté a résidé dans le fait que le Covid est apparu dans un fort moment organisationnel de nos activités où il est important pour nous d’être ensemble. Il a donc fallu trouver des solutions : en moins d’une semaine, nous avons identifié des outils permettant de dématérialiser les rituels que nous avions l’habitude d’avoir en présentiel. Je ne parle pas juste des réunions, parce que c’est facile à mettre en place, mais dans le monde du logiciel, la planification, c’est des post-it sur les murs, des journées entières , des discussions très interactives… Nous avons trouvé les mêmes outils mais en « dématérialisés », étonnamment avec beaucoup d’efficacité et d’efficience.
Concernant donc le deuxième temps ?
Dans ce deuxième temps, nous nous apercevons que, même si l’heure du bilan du Covid n’a pas sonné, certains partenaires et clients ont mécaniquement pris le pli d’arrêter leur activité ou de la limiter.
Après la gestion interne de l’entreprise, la deuxième étape est la prise de conscience que l’on est dans un écosystème. Certaines entreprises sont fortement impactées. Qu’elle soit animale, végétale, et particulièrement en viticulture, la production agricole se pose des questions alors même que le Covid est censé épargner des besoins primaires comme manger. La filière pourrait bien se porter de notre côté, mais non !
itk propose des solutions innovantes : si sommes persuadés du retour sur investissement et de l’intérêt de nos solutions à moyen-long terme, certains acteurs se concentrent sur des stratégies à plus courte échéance. Un décalage se crée au sein de cette filière agricole en pleine modernisation – en tout cas pour l’axe France – via la révolution numérique, et avec le covid-10 un instinct de survie de court terme. Nous sommes donc en train d’imaginer les solutions de demain qui constituent notre ADN, ce qui fait que l’on sera tous touchés, de près ou de loin.
Y-a-t-il malgré tout un bon effet Covid ?
Oui il y a malgré tout un effet bénéfique qui est propre à notre activité. Personne n’a profité de la crise évidemment, mais nous avons été à l’écoute de notre marché – notamment sur la partie élevage – et constaté que beaucoup de techniciens conseils sont restés bloqués chez eux. Nous avons par conséquent ouvert gratuitement une grande partie de nos services pour leur permettre d’avoir des indicateurs supplémentaires, leur permettant, in fine, de travailler à distance.
Entendez par là que tout le monde a touché du doigt, de 7 à 77 ans, le monde numérique, l’intelligence artificielle (réunions à la maison, cours et courses sur internet…). Pour nous, c’est un peu pareil dans l’agriculture. Et c’est une opportunité : tous les gens qui voyaient d’un petit peu loin ces indicateurs que l’on offre chez itk, qui sont assez virtuels, numériques, se sont rendus compte qu’ils étaient très utiles dans cette période de confinement. Je ne sais pas ce que cela va donner à moyen et long terme sur le plan de l’investissement pour chaque entreprise, mais il faut reconnaître que cela nous a permis d’avoir une vitrine. Nous avons moins besoin aujourd’hui de faire la preuve du grand intérêt que nous offrent l’intelligence artificielle et le numérique.
En tant que vice-président de Vinseo, quels retours avez-vous des membres du cluster sur cette crise ?
Certains ont une approche très locale qui disent que cela va souffrir en Occitanie. Les gens ne se projettent pas, ils veulent vider leurs chais, finir la saison. 2021, c’est de la science-fiction pour le moment. Et il y en a d’autres qui ont des approches plus globales. Certains membres de Vinseo sont des internationaux, comme nous, qui disent que l’un dans l’autre certaines entreprises disparaîtront peut-être, et seront rachetées ou concentrées : c’est un remodelage de notre paysage qui s’opèrera, pas forcément en diminuant la qualité des présents.
Quel regard portez-vous, plus généralement, aujourd’hui, sur la filière française ?
L’inquiétude réside plus dans le fait que la France est un pays qui consomme de moins en moins de vin. Notre filière, depuis plusieurs années, n’est pas vraiment soutenue par sa demande intérieure et, en parallèle, elle s’expose de plus en plus à la compétition internationale. Les Etats-Unis par exemple, premiers consommateurs au monde de vin, boivent leur vin en priorité puis se tournent donc vers les vins importés. Mais que vont-ils choisir ? Du vin espagnol ? Chilien ? A nous de les séduire mais en a-t-on véritablement les moyens aujourd’hui ? Où en est notre dynamique commerciale ? Comment présenter nos offres sérieusement ? Cela devient compliqué quand on sort de l’angle local.
L’État vient d’annoncer un dispositif de distillation de crise de 140 millions d’euros en faveur de la filière viticole. Qu’en pensez-vous ?
Notre président de la République nous dit que le jour d’après ne sera pas comme le jour d’avant : notre crainte est que le jour d’après soit pire que le jour d’avant, ou de la même veine ! La viticulture est aujourd’hui soutenue avec de la subvention… qui nous apparaît plus comme de la rustine. Le pays s’endette encore et encore ! Notre position est de dire que c’est peut-être le moment d’aller encore plus loin pour moderniser plus généralement l’agriculture, plutôt que de donner tout de suite de l’argent pour calmer tout le monde. C’est évidemment nécessaire face aux soucis de trésorerie, mais c’est aussi l’occasion de viser à financer cette modernisation afin de la rendre encore plus résiliente que ce qu’elle ne l’est aujourd’hui.
L’action politique gère pour le moment du court terme mais elle a une opportunité fabuleuse de renforcer l’un de ses fleurons qu’est la filière agricole et particulièrement vitivinicole, qui est notre meilleure ambassadrice de notre « made in France » et de notre « art de vivre ». Beaucoup de fournisseurs de cette filière, présents dans Vinseo, peuvent apporter des solutions immédiates. C’est la mise en œuvre de ces innovations qu’il faut principalement soutenir ! »
CONTACT
ITK
9, avenue de l’Europe, 34 830 Clapiers.
Téléphone : 04 67 59 30 46.
Site web : www.itk.fr